3h10 pour Yuma (2007)
Remake du western de Delmer Daves, qui datait de 1957, avec cette fois Christian Bale et Russell Crowe qui s’affrontent. Le premier, Dan, un brave fermier unijambiste, est un peu menteur, puisque, histoire d’acquérir un minimum de prestige auprès de ses enfants, il a raconté avoir perdu sa jambe au combat ; en vérité, un de ses copains lui avait envoyé par accident une balle dans la jambe. Le second, Ben Wade, est un bandit qu’on doit conduire au train, à trois jours de cheval de là, pour l’envoyer à Yuma où il sera jugé, puis sans doute pendu. Inutile de te dire que le parcours ne sera pas de tout repos, sinon il n’y aurait pas de film !
On te précise quelques détails, lecteur friand d’authenticité. D’abord, Dan a un fils de quatorze ans, Will, qui l’accompagne dans son périple et nourrit quelques doutes sur le courage de son paternel. On sait comment sont ces petits salauds, à cet âge. Autre détail, Wade a sa propre bande de malfrats, qui vont tout faire pour empêcher leur chef d’être fourré dans le train par Dan (non, il n’y a aucun sous-entendu érotique dans cette fin de phrase). Et puis, Wade n’est pas le dernier des ploucs, il est intelligent, et un peu artiste, car il dessine des oiseaux. Surtout, il ne manque pas de psychologie, si bien que le jeune Will est fasciné par le bandit et le voit comme une sorte de Robin des Bois, volant les riches pour donner aux pauvres. Mais Wade s’efforce de lui ôter de la tête ces lubies romanesques : non, il est bel et bien une ordure ! Évidemment, Will ne croit pas les dénégations de ce méchant au grand cœur.
Au bout d’une heure et demie – en temps de cinéma – de péripéties et tueries diverses et variées comme on en voit dans tous les films d’action, le cortège arrive en ville, mais le train ne passe que dans trois heures. Dan, son prisonnier, son fils, son escorte et un raton-laveur se retrouvent dans une chambre de l’hôtel local, où les deux principaux protagonistes échangent des propos d’une extrême profondeur sur la condition humaine, et d’une extrême légèreté sur la possibilité pour l’un de se faire corrompre par l’autre. Discussion de laquelle il ressort que nous ne sommes pas dans un souk de Marrakech et qu’il n’y aura donc pas de marchandages : Dan tient à toucher sa prime en toute régularité, c’est son seul espoir de conserver un peu d’estime de la part de son fils. À l’extérieur, c’est nettement moins diplomatique, le second de Wade, qui porte le joli nom de Charlie Prince (Ben Foster), a offert une prime de 200 dollars à quiconque aiderait à tuer Dan, et tu penses bien que c’est la ruée vers cet or d’une couleur inédite. Bref, l’hôtel est vite assiégé, et comme il y a huit cent mètres à parcourir jusqu’à la gare, ce demi-mile n’aura rien d’un parcours de golf à Saint-Nom-la-Bretèche.
Mais il faut croire que le danger galvanise, car notre pauvre unijambiste, pris sous trente-six feux croisés, cavale désormais comme un pur-sang sur l’hippodrome d’Auteuil, au point que ses tirs tous azimuts auraient suffi à ratiboiser l’armée de Sitting Bull à la bataille de Little Big Horn. Après une série d’échanges de balles comme il s’en déroule peu sur les courts de tennis, et qui font monter de quelques points le taux de mortalité locale, scène d’épilogue : Dan et Wade sont sur le quai où le train vient d’arriver, mais les bandits cernent le duo, et Prince menace Dan de son arme. Et même, vu qu’il ne se dégonfle pas, il le bute. Alors, Wade… abat son ex-complice (ainsi que tous ses hommes) et grimpe tout seul dans le train, sans y être contraint, pour montrer au jeune garçon que son père défunt a gagné malgré tout. On voit ça tous les jours, non ? Ne soyons pas naïfs, lorsque le train s’est un peu éloigné, il siffle son cheval et redescend du train pour s’en aller tel Lucky Luke vers de nouvelles aventures, mais que ne ferait-on pas pour préserver l’image du père auprès d’un orphelin ? Ils auraient dû le signaler, sur Allocine.