Match Point (2005)
Match Point est un film cynique et sans morale dont la mission est de rappeler à chacun l’arbitraire de la vie: qu’ici bas, rien n’est juste ou injuste, tout est simplement affaire de chance. La fin de ce film va donc en ce sens et ne pouvait finir que bien pour le héros principal.
En fait de héros, Chris est plutôt un anti-héros: arriviste et opportuniste d’abord puisque, tennisman raté, il n’aspire qu’à monter dans la société en utilisant sans scrupules le tremplin de cette belle-famille riche qui le pousse à réussir. Dégoulinant de gentillesses ensuite avec Chloé, cette femme qui l’adore dès la première rencontre. Agressif et pulsionnel enfin avec Nola, cette roturière américaine hypersensuelle qui l’attire en dépit du bon sens au risque de détruire l’ascension sociale qu’il se prépare minutieusement.
Et pourtant, magie du cinéma oblige, on s’identifie à lui. On se demande ce que l’on ferait, nous aussi, si l’on se retrouvait dans sa situation, tiraillé entre une femme aimante et une bombe sexuelle, entre amour et luxure…
Mais Chris a moins de sagesse que nous, le seul moyen pour lui de préserver sa carrière, sa belle-famille, sa femme enfin enceinte, c’est de supprimer cette maîtresse devenue trop encombrante, trop envahissante, avant qu’elle ne détruise toute sa réussite sociale.
La mise à mort est finement pensée, déguisée en cambriolage de SDF drogué, rapidement expédiée. Le fusil rapidement remis en place, les bijoux volés histoire d’être crédible rapidement jetés à la Tamise. Le meurtre parfait. On, comprend qu’il ne sera jamais pris. A la fin du film donc, Chris peut vivre en paix avec sa femme, sa belle-famille et sa Mercédès.
Mais Match Point est autre chose qu’un simple film d’adultère et de meurtre impuni. C’est du Woody Allen. La fin façon Woody ne se résume pas à «et à la fin il gagne» mais bien à «et à la fin, il a de la chance». Quelle différence? C’est ce superbe moment où la bague volée ricoche sur le pont et ne tombe pas à l’eau… Ce moment où l’on croit qu’il est perdu. Ce passage fait en effet écho au début du film où l’on voyait une balle de tennis tomber du mauvais côté du filet. L’histoire de la vie de Chris avant: il n’a jamais été professionnel, faute de chance, la balle ne tombait jamais du bon côté, alors qu’il l’aurait mérité. Le contre-pied est pris avec cette bague, qui tombe du bon côté (elle sera ramassée par un SDF qui fera figure de coupable parfait) alors que ce coup-ci, il ne le méritait pas. La vie, donc, n’est ni affaire de justice ni affaire de mérite, elle n’est qu’affaire de chance.
Si tu veux philosopher sur le destin et le libre-arbitre de l’homme, tu peux laisser tomber Allocine et filer lire du Voltaire. Moi, en attendant, je vais à la case départ en touchant 20 000F et je tire une carte chance… Qui vivra verra.
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